Notes de lecture : Un Caldoche s’invite dans notre histoire

L’écriture réussit parfois des prouesses : réunir autour d’un projet commun un écrivain du Burundi et un autre perdu dans cet ensemble d’îles et d’archipels mélanésiens de l’océan Pacifique Sud. L’écrivain Paul Joël vit sur le « Caillou »,  à Nouméa en Nouvelle-Calédonie. Depuis plusieurs mois nous travaillons ensemble sur « Lénine est Mort au pays des  Grands Lacs », un livre à paraître bientôt aux Editions Iwacu. Une touchante histoire inspirée par les jeunes martyrs de Buta.
Naturellement, je lui ai envoyé notre dernier livre. Il l’a lu et l’a aimé.

Je suis heureux de partager sa note de lecture. Antoine Kaburahe

Les conflits ethniques sont aussi des sujets calédoniens

Le hasard m’a conduit vers le Burundi le 1er novembre 2018 quand le Père François Grossin, supérieur régional des Pères maristes, titilla ma curiosité en parlant des martyrs de Buta au cours de son homélie durant la messe de la Toussaint à l’église Saint-Jean-Baptiste de la Vallée des Colons en Nouvelle-Calédonie ! J’avais en mémoire les images terribles des massacres au Rwanda, mais peu de connaissances sur les massacres intercommunautaires burundais. De retour chez moi, touché par cette révélation, j’ai cherché sur le net des ouvrages ou des articles sur ces événements. Un article d’un journaliste, Antoine Kaburahe, sur ce carnage a retenu mon attention. Cet article émouvant a fait le tour du monde. Le papier est tellement bien écrit que j’ai de suite envisagé de le reprendre en introduction d’un roman sur le sujet. Comme le vivre ensemble, le communautarisme, les conflits ethniques sont aussi des sujets calédoniens.

Dans mon prochain livre, Lénine est mort dans la région des Grands Lacs, j’ai osé des petites comparaisons et fait des parallèles entre Mélanésie, les îles noires de notre Pacifique Sud et ce petit pays d’Afrique.

Ce journaliste, fondateur du groupe de presse IWACU, qui vit aujourd’hui en exil m’a de suite autorisé à utiliser son article. J’ai découvert avec plaisir qu’il dirigeait une maison d’édition. J’ai décidé de publier chez lui pour bénéficier des connaissances qu’il a sur son pays et aussi par amitié.

Mais je ne savais pas qu’il préparait un livre, ce livre est paru depuis. Je viens de le recevoir et je l’ai lu d’une traite. Hutsi, un titre bien adapté qui évoque les « métis » Hutu-Tutsi et résonne comme un appel à la réconciliation.

Cet ouvrage est un témoignage bouleversant d’un de ses amis journalistes. Antoine a rédigé cet ouvrage à la première personne. L’histoire de son ami, la nostalgie de son pays, c’est aussi son histoire personnelle. Cela se sent dans l’écriture chargée d’émotions. « Le Burundi est un pays qui vit dans la peur », écrit-il. Il parle de « l’ogre 72 » pour parler des massacres du premier génocide. Il y a des expressions comme « Au Burundi les larmes coulent vers l’intérieur », mais il écrit aussi dans un autre passage « Un homme qui ne pleure pas se consume … »

Ce livre et le drame de ce pays méritent d’être connus. Hutsi va y contribuer et j’espère en toute modestie arriver à apporter ma pierre à l’édifice avec mon projet qui avance bien, dixit mon éditeur « fin loin de chez nous », comme on dit ici.
Paul Joël, Nouméa

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